Le 13 octobre, Pfizer annonçait que l’Hôpital pour Enfants de Cincinnati commencerait à enrôler des enfants pour leurs essais cliniques du vaccin COVID-19, faisant de Pfizer la première entreprise américaine à tester un vaccin expérimental contre le coronavirus chez les enfants.

En général, la FDA exige que les institutions qui testent les médicaments et médicaments biologiques (créés à partir de cellules vivantes comme des cellules bactériennes, des cellules de levure ou des cellules de plantes ou d’animaux, plutôt que d’être fabriqués chimiquement comme la plupart des autres médicaments) chez les enfants aient un plan pédiatrique en place, et pourtant certains affirment que la règle « est laxiste au point de ne pas exister du tout. » Comme l’explique le Dr Robert Frenck, directeur du Centre de Recherche Vaccinal de l’Hôpital d’Enfants de Cincinnati, au magazine TIME : « Le plan peut se résumer au fait que « Nous n’avons pas de plan ».

Le 22 octobre, le Comité consultatif sur les vaccins et les médicaments biologiques connexes de la FDA réunit un groupe d’experts pour discuter des vaccins contre le coronavirus. Les membres du Comité s’y sont dits méfiants à l’idée de donner des injections aux enfants, argumentant que les risques pourraient bien l’emporter sur les avantages. Le Dr Luigi Notarangelo, chercheur principal aux National Institutes of Health (NIH), alla plus loin, déclarant ouvertement que les vaccins contre le coronavirus « ne devraient pas être utilisés » chez les enfants « à ce stade » en ajoutant que les données présentées durant la réunion n’avaient pas été suffisantes pour répondre aux questions pressantes de l’innocuité de ces vaccins expérimentaux.

À en juger par le fait que les parents de 100 enfants se sont immédiatement portés volontaires pour que leurs enfants se fassent injecter le vaccin à ARN messager (ARNm) non approuvé, Pfizer et l’hôpital de Cincinnati ont réussi à persuader les parents que, même face aux préoccupations des experts, il n’y a rien à craindre. Dans un premier temps, Pfizer testera le vaccin chez plusieurs milliers de jeunes entre 12 et 17 ans. Le plan est alors d’élargir les tests pédiatriques en incluant les jeunes enfants et les nourrissons.

Grâce à des mois de messages effrayants — une forme de “communication persuasive” utilisant intentionnellement la peur pour « manipuler les individus ou les populations » afin qu’ils « fassent des choses auxquels habituellement ils résisteraient » — de nombreux parents « craignent davantage la Covid qu’un vaccin expérimental », ce qui les rend prêts à « faire confiance à la science » et à donner leur consentement.

L’altruisme malhonnête

La peur n’est qu’une des tactiques utilisées par Pfizer pour attirer les milliers de familles américaines dont la société a besoin pour atteindre la taille de son échantillon pédiatrique cible. De nombreux experts jouent aussi lourdement la carte de l’altruisme, suggérant que « se faire vacciner, quand c’est possible, n’est pas uniquement pour vous. Il s’agit de protéger votre grand-mère qui est diabétique et oncle Jean, qui est immunodéprimé.

Le médecin de Cincinnati à la tête de l’étude pédiatrique de Pfizer mentionna tout cela en suggérant que les enfants vaccinés seront en mesure “d’indirectement “protéger leurs parents, grands-parents, enseignants et formateurs.

Le fait que le chercheur de Cincinnati fasse de telles allégations est à la fois trompeur et déroutant, étant donné que les essais cliniques de Pfizer sont conçus seulement pour évaluer si le vaccin diminue les symptômes légers de la Covid-19. Les essais, comme le souligne un nombre croissant d’observateurs, ne permettront pas de tirer de conclusions quant à savoir si le vaccin prévient l’infection ou interrompt la transmission. Les experts de la réunion du Comité Consultatif sur les Vaccins et les Produits Biologiques Relatifs (VRBPAC) du 22 octobre ont convenu que les essais sur les vaccins « ont de graves défauts de conception ».

Les groupes commerciaux médicaux ont choisi d’ignorer les préoccupations du comité consultatif de la FDA sur la pertinence de précipiter les vaccins COVID-19 chez les enfants. Au lieu de cela, comme l’a rapporté le Huffington Post, l’Académie Américaine de Pédiatrique « sonne l’alarme » dans la direction opposée, et plaide en faveur de l’inclusion « immédiate » des enfants dans les études sur les vaccins.

Les médias n’ont pas hésité à compléter cette offensive, en publiant des annonces de recrutement à peine voilées encourageant la participation des enfants aux essais cliniques. Par exemple, un éditorialiste du TIME déclara récemment que les enfants participant à l’étude de Pfizer se livrent à « un acte héroïque de service public » équivalent moderne des « pionniers de la polio » des années 1950.

L’article du Time ne fait aucune mention de ce qui s’est passé lorsque les premiers vaccins contre la poliomyélite ont fait l’objet d’une procédure accélérée : la « catastrophe massive et très médiatisée » appelée l’incident de Cutter a transmis la polio à des milliers d’enfants, tuant 10 personnes et faisant plus de 160 handicapés permanents. La représentation révisionniste du TIME sur l’histoire du vaccin contre a poliomyélite ne parle pas non plus des graves problèmes de santé et de la douleur atroce qui ont affligé ceux qui ont subi des effets secondaires des vaccins anti-polio, ni du fait que ces vaccins sont la principale cause de poliomyélite et de maladie affiliées « à la poliomyélite ».

Ignorant cette histoire et les près de 400 effets indésirables énumérés dans les notices des vaccins pour enfants, certaines personnalités du grand public se focalisent aussi sur l’héroïsme. Tel que rapporté par le TIME, l’une des adolescentes participantes aux tests Pfizer a eu des encouragements de la part de ses enseignants et d’autres étudiants dans le couloir : « Hé, mon Dieu, c’est tellement cool » et aussi, « Vous êtes si courageuse ! » La mère de l’étudiante y répondant que sa fille « ne fait qu’une toute petite chose qui, selon nous, aidera beaucoup de gens ».

Peser les risques

Comme l’indiquent les experts du Comité consultatif sur les vaccins et les produits biologiques connexes de la FDA, tout le monde ne s’accorde pas à dire que l’injection d’un vaccin expérimental mis au point à la hâte est une « toute petite chose ». Comme la mère de cette adolescente ci-dessus le concède, « il y a des gens là-bas qui ne pensent pas que c’est la chose la plus intelligente à faire. » Toutefois, malgré le fait que les participant adultes à la phase 3 des essais de Pfizer ont souffert d’une fièvre forte, de maux de tête persistants, de douleurs corporelles sévères, d’épuisement et de frissons suffisamment intenses pour casser des dents, la mère de cette adolescente évalue le document de 11 pages fourni par Pfizer (décrivant « tous les si, pourquoi, comment et quoi ») en concluant que sa fille ne risquerait que des effets secondaires mineurs , c’est-à-dire « rien de drastique ou de grave ».

On se demande ce qui est dit à ces parents à propos de la technologie d’ARNm qui n’a jamais été approuvée auparavant et qui est présente dans le vaccin de Pfizer. La technologie de l’ARN messager (ARNm) est fournie par un laboratoire allemand, BioNTech, partenaire de Pfizer qui, en septembre 2019, signa un accord avec la Fondation Bill et Melinda Gates (d’une valeur de 100 millions de dollars) pour « construire son infrastructure de maladies infectieuses ». Les molécules d’ARNm sont connues pour « être intrinsèquement instables et sujettes à la dégradation », avec une composante inflammatoire qui risque de provoquer une « réaction immunitaire dangereuse ».

Pfizer et son concurrent Moderna — qui prévoit de commencer bientôt les tests de son vaccin chez les adolescents — ont récemment fait la Une des médias pour célébrer l’efficacité apparente de leurs vaccins ARNm contre le coronavirus. Toutefois, comme l’a noté le New York Times, les deux sociétés ont présenté des résultats préliminaires loin d’être concluants dans des communiqués de presse soigneusement conçus — extrêmement brefs sur les détails « qui permettraient à des experts externes d’évaluer leurs allégations » — plutôt que dans des revues scientifiques évaluées par des pairs. Le groupe de défense Public Citizen a ouvertement critiqué le bombardement de relations publiques de Pfizer trop imprécis pour être informatif et l’a qualifié de « mauvaise science ».

Les experts vantant ces vaccins ARNm se sont livrés à un certain nombre de contorsions linguistiques pour apaiser les inquiétudes légitimes, reconnaissant que « la rapidité du développement — une idée soulignée par le nom d’Opération Warp Speed — [has] aggrave par inadvertance les préoccupations du public en matière d’innocuité. » Un professionnel de pédiatrique, réfutant le caractère « précipité » du processus de développement du vaccin affirme :« Je dirais qu’il a été intensifié et qu’après chaque phase d’étude, il a été analysé d’une manière peut-être plus rapide que la normale. Cela ne veut pas dire qu’il a été précipité, il a juste été travaillé de manière plus agressive.

Un dirigeant de l’Hôpital d’Enfants de Stony Brook, faisant allusion aux années infructueuses de recherche sur les vaccins ARNm, a également déclaré de façon apaisante : « La technologie de ce vaccin, bien que nouvelle, existe depuis des années. »

Pfizer, pour sa part, admet la nécessité de « mois, voire d’années » de suivi avant de pouvoir assurer de façon significative la sécurité du vaccin. Malheureusement, ses essais cliniques ne durent que 24 mois, et la surveillance active des effets indésirables se concentre essentiellement sur les deux premiers mois seulement. Lors de la réunion de la FDA fin Octobre, un avocat représentant des consommateurs du VRBPAC y déclara : « Il pourrait y avoir des effets indésirables que nous ne connaissons pas, donc, deux mois, n’est-ce pas un peu court ? »

En outre, le suivi à long terme pour les maladies comme le cancer et les maladies auto-immunes deviendra difficile, voire impossible, si les fabricants de vaccins ne cessent d’offrir leurs vaccins aux groupes placebo (effaçant ainsi toute possibilité de comparaison entre deux cohortes), ce que les dirigeants de Moderna et de Pfizer ont tous les deux suggéré qu’ils feront.

Utiliser les enfants, quel que soit le prix

Selon les Centres de Prévention et de Contrôle (CDC), « la plupart des enfants atteints de la COVID-19 présentent de légers symptômes voire aucun symptôme du tout ». Dans sa répartition des risques par groupes d’âge, l’agence de santé publique évalue le risque d’hospitalisation liée à la COVID-19 comme étant neuf fois inférieur chez les enfants de 5 à 17 ans, et leur risque de décès 16 fois inférieur à celui des jeunes adultes âgés de 18 à 29 ans — qui sont eux-mêmes un groupe d’âge à faible risque.

En comparaison, les CDC évaluent le risque de décès chez les personnes âgées de 75 ans et les 84 ans et plus, comme respectivement 220 fois et 630 fois plus élevé que chez les 18-29 ans. À la mi-novembre, les CDC n’avaient attribué que 39 décès à la COVID-19 chez les enfants âgés de 5 à 14 ans (bien moins de 1 % de tous les décès dans ce groupe d’âge). Les CDC reconnaissent également que la plupart des enfants qui développent une maladie grave du coronavirus souffrent de comorbidités telles que l’obésité, le diabète, l’asthme, l’immunodéficience, les maladies cardiaques congénitales ou les troubles génétiques, neurologiques ou métaboliques.

Dans ses circonstances, il n’est pas surprenant que de nombreux parents s’interrogent sur la nécessité d’ajouter un vaccin expérimental COVID-19 au calendrier de vaccination déjà très lourd des enfants. Il serait également normal que les parents commencent à interroger la pertinence des vaccins contre la grippe. De nombreuses études menées au cours de la dernière décennie, y compris chez les enfants, ont indiqué que la vaccination antigrippale augmente le risque de maladies respiratoires aiguës subséquentes à la vaccination, et une étude du Pentagone de 2020 a montré un risque d’infection par le coronavirus de 36 % supérieur après injection du vaccin contre la grippe.

Reconnaissant la nécessité de construire un « socle de confiance »plus solide parmi les parents, les institutionnels se sont affairés à rassembler des contre-argumentations. Tous les signes indiquent que l’utilisation continue de tactiques comme les appels à la peur (y compris les comparaisons du coronavirus avec les « fléaux » passés et les avertissements selon laquelle les parents augmenteront « exponentiellement » le risque que leurs enfants « attrapent le virus » s’ils refusent le vaccin), minimisent les préoccupations liées au risque (même si les experts admettent que « tout vaccin peut provoquer une réaction allergique »), et la bonne vieille corruption (le vaccin étant présenté comme le seul moyen de « se remettre des fardeaux financiers, émotionnels et médicaux que la Covid [COVID-19] a causé »).

Finalement, les véritables « héros » de cette histoire sont probablement les parents qui reconnaissent ces tactiques comme une forme déguisée de coercition, et qui choisissent de protéger leurs enfants plutôt que de les sacrifier sur l’autel d’un altruisme malhonnête.