Aux États-Unis, Bayer AG, propriétaire de Monsanto, est dans le processus de verser d’énormes indemnisations suite à des milliers de poursuites judiciaires intentées par des personnes alléguant qu’elles-mêmes ou leurs proches ont développé un cancer après avoir été exposées aux herbicides Roundup.

Les avocats ont informé leurs clients de l’existence de ce processus, précisant qu’un large pourcentage de plaignants accepte le règlement d’indemnités, tandis que d’autres contestent les montants proposés plus faibles et injustes.

Selon certaines données, l’indemnisation moyenne des plaignants reste insignifiante, une fois les honoraires des avocats prélevés et certains frais médicaux remboursés..

Fin novembre, dans le cadre du litige avec Bayer, l’un des plus important cabinets d’avocats a notifié ses clients que plus de 95 % des ‘plaignants éligibles’ ont décidé d’accepter le plan d’indemnisation négocié . Selon cette notification, un ‘gestionnaire des indemnisations’ a 30 jours pour examiner les plaintes et confirmer l’élligibilité des plaignants à recevoir des indemnités.

Les plaignants peuvent choisir de refuser le plan d’indemnisation et demander une médiation, suivie d’un arbitrage exécutoire ou alors ils peuvent chercher un nouvel avocat. Ces plaignants pourraient avoir de la difficulté à trouver d’autres avocats parce que les cabinets d’avocats acceptent les plans d’indemnisation négociés avec Bayer à condition de ne plus défendre d’autres dossiers et de ne pas enclencher d’autres procès.

Un des plaignants, sous couvert d’anonymat en raison de la confidentialité de la procédure, a déclaré qu’il refusait l’indemnisation dans l’espoir d’obtenir plus d’argent par le biais d’une médiation ou d’un autre procès.

Il a indiqué qu’il a besoin de tests et de traitements continus pour son cancer et que l’indemnisation proposée ne couvre pas ces coûts.

“Bayer veut un règlement à l’amiable en payant le moins possible tout en évitant une procédure judiciaire”.

Les avocats et les plaignants impliqués dans les négociations ont indiqué que l’estimation approximative des indemnisations moyennes nets est d’environ 165 000 dollars par plaignant. Certains plaignants pourraient recevoir beaucoup plus, et d’autres moins, selon le continu de leur dossier. De nombreux critères déterminent l’élligibilité au versement et au montant de l’indemnité.

Pour être élligible, l’utilisateur du Roundup doit être citoyen américain, avec un diagnostic de lymphome non hodgkinien (LNH) et avoir été exposé au Roundup pendant au moins un an avant ce diagnostic.

Le plan d’indemnisation de Bayer sera terminé lorsque le gestionnaire confirmera que plus de 93 % des plaignants sont élligibles selon les modalités de la négociation.

Si le gestionnaire du plan d’indemnisation conclut qu’un plaignant n’est pas élligible, celui-ci dispose de 30 jours pour faire appel de la décision.

Pour les plaignants jugés élligibles, le gestionnaire du plan d’indemnisation accordera à chacun un certain nombre de points en fonction de critères spécifiques. Le montant d’argent imparti à chaque plaignant est basé sur le nombre de points attribué à chaque situation.

Les points sont établis en fonction de l’âge de la personne au moment où elle a été diagnostiquée avec le LNH et en fonction de la gravité de la ‘maladie’ déterminée par la lourdeur du traitement et ses résultats. Les niveaux varient de 1 à 5. Par exemple, le niveau 5 est attribué à quelqu’un qui meurt du LNH. Plus de points sont donnés aux jeunes qui ont subi plusieurs cycles de traitement et /ou qui sont décédés.

Des points supplémentaires sont accordés aux plaignants qui ont été plus longuement exposés au Roundup. Des points sont aussi ajoutés pour des formes spécifiques de LNH. Les plaignants avec un diagnostic de lymphome du système nerveux central primaire (SNC) ont 10 % de points en plus.

Une réduction de points est aussi établie en fonction de certains facteurs. Voici quelques exemples spécifiques de la grille d’attribution de points dans le cadre de la négociation concernant le Roundup :

  • Si un utilisateur de Roundup est décédé avant le 1er janvier 2009, le total des points est réduit de 50 %.
  • Si un plaignant n’avait pas de conjoint ou d’enfants mineurs au moment de son décès, la réduction du nombre des points est de 20 %.
  • Si un plaignant avait un cancer du sang avant d’utiliser le Roundup, le nombre de points est réduit de 30%.
  • Si le délai entre l’exposition au Roundup et le diagnostic de LNH est inférieur à deux ans, le nombre de points est réduit de 20 %.

Selon les avocats des plaignants, le versement des indemnités devrait commencer au printemps et les derniers paiements être effectués d’ici l’été.

Les plaignants peuvent également faire une demande auprès du ‘Extraordinary Injury Fund’, créé pour un petit groupe souffrant de graves séquelles liées à la LNH. Pour être admissible au ‘extraordinary injury fund’, la personne atteinte de LNH doit être décédée suite à un minimum de trois cycles de chimiothérapie ou à d’autres traitements agressifs.

Depuis l’achat de Monsanto en 2018, Bayer peine à régler le litige de plus de 100 000 plaignants aux États-Unis. Jusqu’à présent, l’entreprise a perdu les trois procès ainsi que les premières séries de procès en appel. Les jurys dans chacun des procès ont constaté que les herbicides à base de glyphosatecomme le Roundup engendraient le cancer et que Monsanto a dissimulé les dangers de ce produit pendant des décennies.

Le jury a condamné Montsanto à verser plus de 2 milliards de dollars, mais les procès et les jugements en appel ont réduit ce montant.

Le réglement des litiges par l’entreprise a été entravé en partie par la problématique de trouver des moyens d’empêcher de nouvelles plaintes de personnes développant des cancers après l’utilisation de ces herbicides.

Les procès en appel continuent.

Alors que Bayer essaye d’éviter de nouveaux procès et de payer des indemnités, l’entreprise se bat pour faire annuler les condamnations des trois procès.

Dans le premier procès de Johnson contre Monsanto, Monsanto a été jugé en appel responsable du cancer de Johnson et en octobre, malgré la demande de Bayer, la Cour suprême de Californie a refusé de réexaminerl’affaire.

Bayer dispose désormais de 150 jours à partir de cette décision pour demander que l’affaire soit reprise par la Cour suprême des États-Unis. Selon un porte-parole de Bayer, l’entreprise ne sait pas si elle va donner suite à cette demande, alors qu’elle avait déjà indiqué auparavent son intention de solliciter la Cour suprême des États-Unis

Si Bayer sollicite la Cour suprême des États-Unis, les avocats de Johnson devraient déposer un contre-appel conditionnel demandant à la Cour d’examiner les actions judiciaires précédentes qui avaient réduit les indemnités de Johnson de 289 millions de dollars à 20,5 millions.

Autres affaires judiciaires Bayer/Monsanto

En plus de la responsabilité de Bayer dans le cadre du litige sur le Roundup de Monsanto, l’entreprise est aux prises avec les litiges relatifs à la pollution par les BPC (biphényls polychlorés) et les litiges relatifs à l’herbicide Dicambaqui nuit aux cultures .

Un juge fédéral de Los Angeles a rejeté la semaine dernière la proposition de Bayer de payer une indemnité de 648 millions de dollars pour régler un recours collectif relatif à la pollution par les BPC de Monsanto.

Toujours la semaine dernière, le juge de première instance dans l’affaire Bader Farms, Inc. contre Monsanto a rejeté les requêtes de Bayer en vue d’un nouveau procès. Le juge a toutefois réduit le montant des dommages-intérêts qui se voulait exemplaire, accordé par le jury, de 250 millions de dollars à 60 millions de dollars, soit une indemnité totale de 75 millions de dollars en maintenant le montant des dommages-intérêts compensatoires à 15 millions de dollars.

Les documents révélés dans l’affaire Bader, ont montré que Monsanto et le géant chimique BASF savaient depuis des années qu’en distribuant des semences à base d’herbicides Dicamba et d’autres produits chimiques, de nombreuses fermes américaines subiraient vraisemblablement de graves dégats.

Publié avec la permission ‘U.S. Right To Know’.