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octobre 27, 2020

L’électroconvulsivothérapie, ou traitement par électrochocs, sur les jeunes autistes est injustifiée et dangereuse, affirment les experts médicaux.

Le film de 1975, « Vol au-dessus d’un nid de coucou », a attiré l’attention du public sur une procédure des années 1930 appelée lobotomie : une intervention qui altère le cerveau et décrite comme une « chirurgie de l’âme » par l’un de ses principaux partisans, le Dr Walter Freeman. Les lobotomies ont été effectuées sur des milliers d’adultes américains, et aussi des enfants, jusque dans les années 1980 avant de peu à peu (mais pas entièrement) décliner.

La procédure a acquis le surnom de « lobotomie au pic à glace » dans les années 1940 et 1950 parce que les praticiens utilisaient un «instrument à pointe effilée de type pic” pour atteindre le cerveau par le globe oculaire afin d’y sectionner les connections nerveuses, après avoir d’abord “maîtrisé” les patients avec des traitements par électrochocs. « Vol au-dessus d’un nid de coucou » dépeint la lobotomie comme un outil grossier pour « stabiliser » la personnalité et éliminer « l’excès d’émotion» — avec des résultatssouvent drastiques et parfois mortels .

La fin des années 1930 a été un âge d’or des expérimentations sur le cerveau de patients déclarés schizophrènes, bipolaires ou sévèrement déprimés – ou comme le dit Dr Peter Breggin, psychiatre américain et lanceur d’alerte, pour la recherche de « nouvelles façons d’infliger des dommages contrôlés sur le cerveau d’un patient sans détruire complètement sa fonction. » Peu de temps après la naissance de la lobotomie, les psychiatres italiens se sont concentrés sur la composante électrochoc de la procédure, et ont commencé à promouvoir le choc électrique comme une intervention psychiatrique.

Quatre-vingts ans plus tard, l’utilisation d’une thérapie électroconvulsive (ECT) est non seulement couramment utilisée pour traiter la psychose et autres maladies dites psychatriques, mais est aussi une option « à usage non indiquée » mais acceptée de façon inquiétante pour des indications élargies comme l’autisme sévère. Basée sur l’hypothèse que les crises intenses peuvent avoir des effets thérapeutiques (une proposition étrange pour les nombreuses personnes autistes qui souffrent déjà de crises insolubles), le but de l’ECT est de délivrer un courant électrique à travers le cerveau pour induire une crise d’épilepsie généralisée.

Les partisans de l’ECT pour les jeunes autistes et les adultes déprimés soutiennent que « l’ECT des temps modernes est loin des anciennes méthodes qui ont valu à l’ECT sa sinistre réputation ». Ces « vieilles méthodes » produisaient de violentes convulsions « suffisamment fortes pour casser les os ». Mais l’ECT moderne qui provoque un coma temporaire et une linéarité des ondes cérébrales, ne semble guère plus rassurante.

Une étude de 2006 dans la revue Advances in Psychiatric Treatment déclarait que « les nouvelles méthodes d’ECT n’ont pas entraîné une diminution significative des effets indésirables. » De plus, même si les amateurs d’ECT vantent l’ECT du 21ème siècle comme étant une technique très « maîtrisée » et « raffinée », ils admettent également que « la durée optimale de la crise reste floue» et qu’ils ne comprennent pas vraiment commentl’ECT fonctionne.

« Effets secondaires » — question de perspective ?

Les neurochirurgiens admettent que les interventions psychiatriques du cerveau représentent un « bourbier éthique ». Pourtant, la pratique de l’ECT se base sur la conviction persistante que « les maladies psychiatriques peuvent être traitées par la destruction sélective des tissus cérébraux sains. » Pour cette raison — et parce qu’ils sont professionnellement et institutionnellement engagés dans la promulgation de l’ECT — ses promoteurs en rejettent les conséquences connues, telles quela confusion et la perte de mémoire,et les considèrent comme de simples « effets secondaires ».

Tout le monde n’est pas d’accord. Dr Peter Breggin, psychiatre formé à Harvard, Explique que, parce que l’ECT fonctionne en endommageant intentionnellement le cerveau, ses effets sont comparables à une lésion cérébrale traumatique. Après seulement une à trois séances d’ECT, les dommages peuvent, non seulement provoquer des symptômes physiques tels que maux de tête et nausées, mais aussi nuire de façon permanente à la mémoire et la concentration, et « détruire » le sens du soi. Le Dr Breggin résume ainsi:

« après plusieurs sessions d’ECT de routine, la personne lésée devient de plus en plus apathique, indifférente, incapable de ressentir des émotions authentiques, voir même robotique. La perte de mémoire et la confusion s’aggravent. L’individu impuissant devient incapable d’exprimer sa détresse ou ses plaintes, et devient docile et maniable. Les médecins de l’ECT parlent faussement d’amélioration, mais cela indique au contraire des lésions cérébrales graves et invalidantes.

Selon d’autres critiques, « toute allégation selon laquelle l’ECT ne causerait pas de lésions cérébrales ignore les fondements de la science électrique. » Un expert en bio-ingénierie souligne que l’ECT peut provoquer des effets sur les cellules cérébrales, y compris leur dysfonctionnement, une blessure temporaire, voir la mort permanente des cellules et, en raison de la nature pulsante de la tension, un effet marteau-piqueur qui peut déchirer des trous dans les parois cellulaires … conduisant à l’altération ou à la destruction des membranes cellulaires.

Faisant écho à la comparaison de la lobotomie à une « chirurgie de l’âme », Breggin affirme que le ciblage des régions vitales du cerveau a des implications profondes :

« L’électricité ne se déplace pas seulement à travers les lobes frontaux — siège de l’intelligence, de la réflexion, de la créativité et du jugement — mais aussi les lobes temporels, siège de la mémoire. Vous endommagez l’expression même de la personnalité, du caractère, de l’individualité et même, si vous y croyez, l’expression de l’âme.

L’autisme : s’attaquer aux conditions médicales sous-jacentes donne de meilleurs résultats que l’ECT.

Étiqueter l’autisme comme une maladie psychiatrique s’avère être l’un des virages les plus tragiques jamais pris dans la médecine moderne. Depuis au moins deux décennies, les parents, les cliniciens et les chercheurs se sont opposés à ce diagnostique stéréotypé, montrant comment « l’autisme » est un terme générique pour un « ensemble d’anomalies très diversifié affectant de nombreux systèmes du corps humain.

De plus, les critiques affirment que ces systèmes, qui gèrent les fonctions métaboliques, mitochondriales, immunologiques, gastro-intestinales et neurologiques, « interagissent de manière complexe et hautement interdépendante ».

En juillet 2013, le Dr Timothy Buie, médecin à Harvard, présenta des études de cas (timestamp 1:08) au Centre d’Intervention Précoce en Autisme (CIPA), un comité consultatif fédéral sur l’autisme. Ces études illustrèrent comment les comportements d’autisme souvent étiquetés comme psychologiques ont un fondement médical. Partageant des séquences vidéo de deux jeunes souffrant de douleurs gastro-intestinales aiguës, Buie souligna que « l’inflammation quelque soit sa localisation dans le corps peut être un déclencheur d’effets sur l’activité cérébrale. » Plus crucial encore, selon Buie, lorsque les problèmes médicaux sous-jacents sont correctement traités, les problèmes de comportements tels que l’automutilation peuvent se résoudre « complètement ».

Bref, reconnaître que le cerveau et le système nerveux sont interconnectés avec d’autres systèmes du corps ouvre la possibilité de s’attaquer à certains symptômes majeurs de l’autisme, améliorant ainsi la qualité de vie considérablement.

Malheureusement, la présentation de l’IACC qui suivit immédiatement le discours de Buie, reflétait une approche différente, qui ne tenait pas compte des facteurs médicaux sous-jacents (comme la douleur chronique ou le déferlement sensoriel) qui pourraient provoquer l’automutilation.. Dr Lee Wachtel, l’un des principaux promoteur de l’ECT à l’École de Médecine Johns Hopkins, présenta celle-ci comme un moyen de stopper les comportements difficiles sans aborder aucun des problèmes sous-jacents.

Wachtel ne cesse de promouvoir l’ECT. En 2018, dans un article du Psychiatric Times, Wachtel préconisa spécifiquement l’ECT pour les adolescents atteints d’autisme et ayant un comportement d’automutilation. En comparant l’ECT à la dialyse rénale, Wachtel précisa le protocole de traitement agressif; celui-ci implique non seulement la stimulation d’électrode, mais aussi l’anesthésie générale, les relaxants musculaires (pour éviter les convulsions dommageables) et l’oxygénation continue – administrée aussi souvent que plusieurs fois par semaine au départ et tous les cinq à dix jours pour l’ « entretien », le tout s’élevant à des centaines de séances au fil du temps.

D’autres médecins utilisant l’ECT avec des patients plus jeunes s’entendent sur la nécessité de séances d’entretien en continu afin de conserver la «stabilitéclinique. » L’un des promoteurs de l’ECT à l’École de Médecine Johns Hopkins a reconnu que lorsque l’ECT est utilisée pour réduire les comportements auto-préjudiciables chez les patients autistes, ces mêmes patients « ne peuvent pas connaitre de réduction du dosage d’aministration de l’ECT » et des traitements en continu sont nécessaires. Il ajoute : « Personne ne connaît vraiment les effets à long terme de l’ECT administrée à cette fréquence et commencée chez des patients aussi jeunes. »

Il est temps d’interdire, et non de promouvoir, l’ECT pour les enfants et les adolescents.

Lorsque les médecins appliquent l’ECT chez les enfants et les adolescents autistes, ils en font une pratique non indiquée. En effet, les dispositifs de l’ECT ne sont pas approuvés pour l’autisme par la FDA (l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux). La société d’assurance Aetna considère l’ECT comme «expérimentale et relevant de l’investigation” dans le traitement des troubles du spectre autistique.

Dans les années 1970, la FDA classait les dispositifs de l’ECT comme des Dispositifs de Classe III . Mais en 2009, l’organisme de réglementation lança un processus de reclassement en tant que Dispositifs de Classe II à faible risque. Malgré une forte opposition majoritaire (79%) du public et des experts, la FDA alla de l’avant. Depuis fin 2018, les Dispositifs de l’ECT font partie des dispositifs de Classe II, y compris pour les adolescents atteints de catatonie (une caractéristique fréquente de l’autisme), de trouble bipolaire et de dépression majeure.

Depuis 1979, Breggin milite héroïquement en faveur d’une interdiction totale de l’ECT, pratique qu’il qualifie de dangereuse et abusive. Breggin encourage fermement l’abolition de la pratique chez les mineurs, mentionnant les études de suivi à long terme des patients soumis à l’ECT qui prouvent indiscutablement « les énormes dommages faits au cerveau et à l’esprit ».

Malheureusement, comme l’illustre le reclassement de la FDA, les États-Unis vont dans la mauvaise direction. Même si l’Organisation Mondiale de la Santé a déclaré dans son Atlas de la santé mentale 2005 qu’il n’y a « aucune indication pour l’utilisation de l’ECT sur les mineurs, et donc que cette pratique devrait être interdite par le biais de la législation » (p. 64), l’American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, publia à peu près à la même époque, des paramètres d’utilisation de l’ECT chez les adolescents. Malheureusement, ces lignes directrices sont souvent utilisées pour justifier l’utilisation croissante de l’ECT chez les jeunes populations.

Wachtel et ses collègues rejettent les indiscutables objections à l’utilisation d’ECT chez les enfants en les considérant comme e résultat d’une« résistance et d’une stigmatisation mal informées ». » Mais les experts qui ont étudié les risques à long terme de la procédure, comme Breggin et d’autres critiques, considèrent l’ECT comme barbare. Comme le déclara un professeur britannique, « Le bon sens impose que vous ne passiez pas de haute tension d’électricité dans le cerveau d’enfants. » Un professionnel de la santé mentale en Australie, critique de l’ « abrutissement vers le bas » de la psychiatrie en tant que profession, affirme:

« [L]orsque [today’s psychiatrists] le patient est compliqué, ils ne savent pas quoi faire. […] Ils atteignent donc très rapidement la limite de leur champ de compétences et n’ont pas d’autre choix que d’utiliser les électrodes. Un psychiatre qui affirme que : « vous avez besoin d’électrochocs » veut en fait vous dire : « je ne sais pas quoi faire d’autre. »

Cet article est le premier d’une série sur l’électroconvulsivothérapie (ECT) ou traitement par électrochocs.

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